Une thérapie change durablement votre personnalité
Une nouvelle recherche, impliquant plus de 20 000 participants, montre que quelques semaines de thérapie avec un psychologue suffisent pour provoquer des changements de personnalité significatifs et durables. Comment est construite cette étude, et quelles sphères de la personnalité seraient affectées par ces changements ? Décryptage en 5 questions.
Une étude avec 20000 participants ?
Cette étude, menée par Brent Roberts (2017, Université de l’Illinois), est en fait une « méta-étude » qui analyse un ensemble d’autres études déjà publiées entre 1959 et 2013. Cette méthode permet d’examiner, dans la longue durée, l’évolution des traits de personnalité sur un échantillon très large de patients.
En effet, à partir des résultats aux tests de personnalité des sujets ayant eu recours à une thérapie, cette étude s’intéresse aux variations entre les mesures initiales (avant la thérapie) et les évaluations successives de ces mêmes sujets les années suivantes.
Comment mesurer la personnalité ?
Un modèle fait aujourd’hui consensus dans la communauté scientifique pour appréhender la personnalité, on parle des Big five. Ce modèle comprend – comme son nom l’indique – 5 grandes dimensions ou « traits » pour définir la personnalité. On mesure ces dimensions à l’aide de questionnaires.
D’un point de vue métaphorique, les dimensions s’apparentent aux couleurs primaires qui peuvent se combiner à l’infini. on peut les décrire comme des continuums, sur lesquels nous nous situons de manière singulière. Ainsi, évaluer la personnalité revient à dégager des tendances s’agissant de nos schémas émotionnels, nos processus de prises de décision, notre vision du monde, …
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Sur quoi portent ces changements « post thérapie » ?
Généralement, à l’âge adulte, un « profil » de personnalité est peu susceptible de changer. Or, cette étude montre que deux dimensions sont sujettes à des évolutions spécifiques : l’Extraversion augmente et le Névrosisme baisse.
Le domaine Névrosisme décrit une tendance à se focaliser sur les aspects négatifs de la réalité. La diminution constatée dans l’étude pourrait se traduire chez un individu par un accès plus important à des états de détente; ou une meilleure gestion des situations stressantes.
Un score plus élevé en Extraversion se traduit par une tendance à éprouver plus fréquemment et plus intensément des émotions positives. La sociabilité est également affectée avec une plus grande propension à rechercher des contacts, des stimulations et à y trouver du plaisir.
Quelles sont les autres dimensions de la personnalité ?
Le modèle Big five, outre le Névrosisme et l’Extraversion, propose 3 autres dimensions. L’Ouverture à l’expérience décrit une tendance à rechercher la nouveauté. On peut opposer des profils orientés vers la curiosité, l’originalité de personnalités pragmatiques et pratiques. Le Caractère Consciencieux correspond à la tendance à se fixer spontanément des objectifs élevés et à les poursuivre de manière ordonnée, organisée et persévérante.
Enfin, l’Agréabilité est liée la bienveillance, l’altruisme, la compréhension des autres, … Les personnes à forte Agréabilité vont rechercher des relations harmonieuses, non conflictuelles. A l’opposé, une faible Agréabilité traduit une méfiance à priori envers autrui, une tendance à la compétition et une facilité à exprimer son irritation sans détour.
Quelles conclusions ?
Une hypothèse secondaire de cette étude porte sur l’importance de la technique thérapeutique employée (remédiation cognitive, psychanalyse, thérapie comportementale, ….). Cette variable n’a en fait aucune incidence sur les résultats. Cela confirme une méta-étude précédente (Wampold, 2001) qui parvenait à des conclusions semblables : à peine 8 % de la variance du changement thérapeutique s’explique par l’utilisation d’une technique spécifique.
Cependant, 92 % de cette variance est liée à des facteurs communs, dont un prédominant : le psychothérapeute. C’est bien la qualité du thérapeute qui prédit son efficacité, mais cet aspect est déconnecté de la nature de sa technique thérapeutique.
Concernant cette étude, les changements durables que les psychologues arriveraient donc à catalyser en thérapie peuvent témoigner d’une expérience atypique et profonde vécue par le patient. Les traits de personnalité sont des composantes très stables de la vie psychique. Les voir évoluer, même modérément, peut être un marqueur de l’efficience de la situation thérapeutique. On peut également questionner si ces changements ne seraient pas, en puissance, inscrits dans la démarche du patient, qui précède le face à face thérapeutique ?
Pour aller + loin :
L’étude de Brent Roberts : A Systematic Review of Personality Trait Change Through Intervention.
L’étude de Bruce E. Wampold : Let’s Face Facts: Common Factors Are More Potent Than Specific Therapy Ingredients
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